Page 14 - Romania 100
P. 14

            avantage tactique qui semblait décisif pour l'issue de la guerre. Dans ces conditions, la Roumanie a du accepter l'armistice de Focşani du 26 novembre/9 décembre 1917
et signer la paix asservissante de Bucarest du 24 avril/7 mai 1918, accepter la perte de la région montagneuse et de Dobrogea et l'asservissement de son économie pendant 90 ans aux intérêts des puissances centrales. Mais cette troisième paix, après les deux premières signées par les puissances centrales à Brest Litovsk avec l'Ukraine (9 février) et avec la Russie soviétique (3 mars), a compromis définitivement la diplomatie et l'élite politique allemande, la présentant aux yeux du monde entier comme une bande de voleurs avec qui personne n'avait rien à négocier.
En ces mois dramatiques pour ce qui restait de la Roumanie, le 27 mars/9 avril 1918, la Bessarabie s’est unie au royaume roumain, donc à un pays vaincu par la guerre, en faisant un premier pas vers
la formation de la Grande Roumanie. Et on ne peut pas dire du tout que c’était une conquête de la Bessarabie par l'armée roumaine.
Lorsque les États-Unis ont rejoint les puissances de l'Entente le 6 avril 1917, mais pas en tant qu'allié mais en tant qu'associé, l'alliance portant le nom de puissances alliées et associées, à la tête de la coalition occidentale est venue l'une des plus grandes personnalités du XXe siècle, le président américain Woodrow Wilson, un dirigeant pour qui
14
le principe des nationalités ou la formation d'États nationaux n'était pas simplement une promesse d'attirer des alliés, mais un idéal à atteindre.
Bien que la situation militaire se soit effondrée dramatiquement pour les puissances centrales
en septembre 1918 dans les Balkans et surtout sur le front occidental, grâce à l'intervention des troupes américaines, les dirigeants de l'Entente, en premier lieu le Premier ministre français Georges Clemenceau, ont exhorté la Roumanie à rentrer le plus rapidement possible en guerre et le général Berthelot fut renvoyé en Moldavie à cet effet dès le 1er octobre. Le 10 novembre, la Roumanie a déclaré la guerre à l'Allemagne exactement la veille de la conclusion de l'armistice de Compiègne. C'est ainsi que la fin de la Grande Guerre a retrouvé la Roumanie dans le camp victorieux.
Le démembrement de l’Autriche-Hongrie au début
de novembre 1918, lorsque toutes les nations opprimées - Tchèques, Slovaques, Polonais, Slovènes, Croates ont affirmé leur volonté de former des États nationaux - a permis aussi
aux Roumains de son territoire d’exprimer leur souhait d’union avec la Roumanie: les Roumains de Bucovine ont proclamé l'union le 28 novembre et les Roumains de Transylvanie, Banat, Crişana et Maramureş ont fait de même à la Grande Assemblée nationale à Alba Iulia le 1er décembre 1918, une jour pour l'éternité, qui depuis 1990 est la fête nationale de la Roumanie.
La manière dont le président américain Wilson a imposé ses principes à la Conférence de paix de Paris de 1919-1920 a été le troisième facteur qui a aidé les grandes puissances
à reconnaître la volonté
déjà librement exprimée des peuples de l'Europe centrale
et du sud-est pour former des états nationaux. Ainsi ont été reconnues les frontières déjà tracées de la Grande Roumanie, un pays qui s'est avéré capable de défendre, par la force des armes, l'Europe du danger du bolchevisme arrivé au pouvoir en Hongrie en mars 1919, un pays fidèle aux principes de la démocratie, un pays qui s’est engagé dès le premier moment dans la défense du système politique fondé au cours de ces années.
Le siècle d'histoire tumultueuse qui a suivi a démontré à la fois l'importance de la Roumanie
et de ses voisins dans les constructions européennes
qui ont été essayées, mais également le fait que les Roumains et leurs voisins sont restés profondément attachés aux valeurs de la démocratie et ont commencé à reconstruire des États démocratiques après la dissolution du système soviétique dans les années 1989-1991.
Aujourd'hui, célébrer le centenaire de la Grande Roumanie, c'est célébrer
et réaffirmer le principe démocratique de la volonté librement exprimée des peuples, le principe le plus important qui puisse apporter durabilité et cohésion à l'Union européenne.














































































   12   13   14   15   16